Dans les précédents articles de cette série, nous avons abordé le coût des boiteries, les causes derrière les boiteries et les problèmes de pattes et comment les éviter. Cependant, parfois, la prévention n’est pas suffisante et certaines vaches souffrent tout de même de boiterie. En résumé : les boiteries entraînent une réduction de la production de lait et de la fertilité, voire parfois une réforme prématurée. On estime qu’un cas de boiterie coûte en moyenne 93 euros. C’est pourquoi il est de la plus haute importance de les détecter aussi tôt que possible.
Traditionnellement, l’éleveur détectait les cas de boiterie en observant comment les vaches marchaient jusqu’au robot de traite, ou le pareur repérait les problèmes de pattes lors de ses visites de l’élevage. Or, la taille des élevages augmentant et les robots de traite offrant plus d’autonomie aux éleveurs comme aux vaches, la détection précoce d’un début de boiterie devient difficile et prend du temps. C’est là que l’automatisation entre en jeu.
Les boiteries affectent les vaches de nombreuses façons différentes. Elles affectent directement leur démarche, leur alimentation, leur repos et leur comportement social, ainsi que leur production de lait. En surveillant les changements sur ces points, il est possible de détecter les boiteries de manière automatisée. Les mécanismes de détection automatique des boiteries incluent l’adoption d’approches directes et indirectes. Dans le cadre des approches directes, les données de production sont analysées et, si les indicateurs de performance ne sont pas atteints, une alarme est déclenchée. Le principal inconvénient de cette approche réside dans le fait qu’elle détecte la boiterie quand la production de lait diminue. Cela a deux conséquences : premièrement, le signal arrive assez tard ; et deuxièmement, le signal n’est pas non plus très spécifique, car une mammite ou une autre maladie peut également être la cause d’une baisse de la production de lait.
Les approches directes consistent à utiliser des capteurs corporels, tels que des podomètres ou des accéléromètres, ou encore des capteurs à distance, tels que des caméras. Les capteurs corporels mesurent généralement la motilité de la vache en comptant le nombre de pas qu’elle fait tout au long de la journée. Ou, s’ils sont plus avancés, ils analysent la répartition de l’activité (par ex., la marche, le repos, l’alimentation, etc.). Quand ces activités ne figurent pas dans la plage normale, une alarme est déclenchée. Cependant, les capteurs corporels sont rarement utilisés, car ils sont intrusifs, ils demandent beaucoup de maintenance et leur coût augmente en cas de grands troupeaux.
Les caméras sont de bonnes candidates pour surveiller les vaches, car elles demandent peu de maintenance et sont relativement bon marché. Les caméras permettent d’analyser la démarche des vaches. En effet, elles filment les vaches sortant du robot de traite, et des algorithmes spécialisés peuvent détecter les anomalies telles que les dos arqués ou des pas irréguliers. Si l’idée semble intéressante dans la pratique, de tels algorithmes peinent encore à identifier les débuts de boiterie, et peuvent pour l’instant détecter de manière fiable uniquement les cas les plus évidents.
Ce domaine fait l’objet de nombreuses recherches et, avec le développement de l’intelligence artificielle, les scientifiques sont à la recherche de nouveaux algorithmes pour suivre les mouvements des vaches sur vidéo et les analyser automatiquement, comme dans l’industrie des jeux vidéo. À l’avenir, les élevages pourraient alors être équipés de caméras et de logiciels qui indiqueraient aux éleveurs les vaches montrant des signes de boiterie et leur permettraient de prendre des mesures immédiates. La route vers la détection entièrement automatisée des boiteries est encore longue, mais nous espérons voir des avancées dans les années à venir.
Entretemps, la prévention reste la meilleure façon de réduire la prévalence des boiteries dans votre élevage. Comme discuté dans notre précédent article, les mesures préventives incluent, sans s’y limiter, une ration équilibrée contenant suffisamment d’oligoéléments (par ex., de la biotine), un parage régulier et le nettoyage et la désinfection des pattes au quotidien.